L'Histoire commence par "un couple de futurs amants marchait, au milieu de la chaussée, dans une rue piétonne, un peu avant l'heure du dîner."
J'ai aimé ce livre et je me suis accrochée aux débuts confus et laborieux, parce que j'étais partie – à tort – dans l'idée que "la conversation amoureuse" ne serait qu'un roman à deux voix. Mais la construction est plus subtile, "La conversation amoureuse" est un roman à deux voix, tissé dans le roman de nos vies, de nos couples, les nôtres, ceux qui nous ont servi de modèle comme de contre-modèle, et ceux qui nous entourent.
Nous retrouvons le talent d'Alice Ferney qui a ici encore une construction mentalisée pour décrire le monde émotionnel. Et cela me fascine comme cela m'éclaire sur ce monde des émotions. Ce monde des émotions est opaque quand on n'y pénètre pas, opaque quand on y est pénétré. Seuls les allers-retours entre émotion et réflexion éclairent ce monde fascinant. Et Alice Ferney a, pour moi, un talent incomparable, pour construire "autour" de l'émotion.
Et je me dois de préciser que la lecture de "La conversation amoureuse" m'a d'autant plus fascinée que je me suis replongée dans une période de ma vie amoureuse, période belle et obscure, période qui souffre souvent de manquer d'éclairages, période sourde et aveugle à tous les éclairages ….
Qu'est-ce que l'amour ? …
La quête de l'amour …
Un triptyque littéraire sur trois siècles
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… Qu'est-ce que l'amour ? …
On pourra lire beaucoup sur ce qu'est l'amour au travers de l'évolution d'un couple. Tous ont connu sans mal les trois premières étapes. Nombreux rêvent encore de connaître la quatrième … Alors ? L'amour, qu'est-ce ?
* Est-ce tomber amoureux, rêver des caresses, imaginer des promenades, lire en l'autre comme il lit en soi, se nourrir de silences et de regards, saliver et perler de sueur en pensant à son corps sous nos mains ?
* Ou est-ce après ? Le moment de la construction de la relation en s'adaptant à l'autre, cette période où des projets se concrétisent comme preuve et ciment de l'amour déclaré maintenant au monde ?
* Et est-ce le même amour, exsangue cette fois, fatigué ou complètement mort, quand chacun dans son couple est épuisé par ses conflits intérieurs comme de ceux avec son conjoint ? Est-ce que ce moment où l'un ou les deux décide de l'arrêter est l'intime preuve que l'amour a existé, puisqu'il n'existe plus ? A moins que la finitude d'un amour prouve au contraire qu'il n'a jamais existé ? La littérature romantique de l'Amour unique à différencier de la Passion encombre nos réflexions. L'amour procure des émotions, et comme toute émotion, elles sont pleines de sens et d'instantanéité.
* Alors d'aucuns diront que l'Amour, le vrai, est ce dernier moment où au contraire le couple sublime les conflits, tant intérieurs qu'entre eux. Grâce à leur amour, ils vont enfin accéder à l'acceptation conjointe de ce que chacun est et de ce que l'autre est.
Alice Ferney évoque en filigrane ces phases du couple, et un certain nombre va exploser en phase 3. Ce qui, du reste, est assez cohérent avec les statistiques actuelles de séparation ...
La quête de l'amour
Alice Ferney va surtout peindre et dépeindre la vie d'un couple illégitime, leur vie à chacun des deux comme la quête de l'amour ultime porté par le désir amoureux. Alice Ferney dévoile la magie blanche et noire, la puissance bénéfique et maléfique du désir amoureux sur l'homme, la femme, le couple.
Dans cette quête, Alice Ferney postule des différences entre homme et femme. Pourquoi pas ? Je comprends que cette étiquette rend l'histoire socialement plus fluide, accessible. "La femme sensible" et "l'homme raisonnable" nous renvoient à des images sécurisantes, pour ne pas dire d'Epinal … C'est un postulat qui augmente le réalisme de l'œuvre, qui évite de s'en décrocher. Mais je n'y crois pas, je ne crois pas à la théorie stendhalienne de la cristallisation, qu'une fois la langueur partagée, le désir féminin se love sur lui-même et sacralise l'être aimé, tandis que le désir masculin va en s'amenuisant. Je crois que cette histoire aurait pu être vécue inversement, "l'homme sensible" et "la femme raisonnable". Mais cette incidente n'enlève rien à la pertinence d'Alice Ferney. Son roman ne traite pas des différences entre les hommes et les femmes, mais du désir amoureux.
Un triptyque littéraire sur trois siècles
Tout au long de ma lecture, je me suis aussi amusée en pensant aux "Vingt quatre heures d'une femme sensible" de Constance de Salm, roman épistolaire publié en 1824, et repris par Stephan Zweig sous le titre "Vingt quatre de la vie d'une femme" en 1929. Ces deux écrivains ont, chacun par leur point de vue, regardé l'amour perdu (Constance de Salm) et l'amour vécu (Stephen Zweig). Alice Ferney complète le triptyque sur la vie entière du couple éperdu.
D'un siècle à l'autre, il est fascinant de constater que les environnements sociaux vont décomplexer le désir amoureux, mais ne pas en changer sa nature ni sa force ou sa fougue. En 1824, une femme n'étale pas ainsi son désespoir amoureux. En 1929, une femme ne quitte pas mari et enfants pour s'adonner à sa passion aussi subite que fulgurante. Et en 2000, une femme garde son secret, et ce n'est pas par convenances sociales …. sortir du secret serait sortir de l'empreinte.
Vous l'aimerez aussi …
Partez (re-) découvrir le désir amoureux. Cela est si différent de la passion, "on peut être si seul qu'un autre vous devient tout". Car l'amour ça existe, et c'est beau, et ça se voit, et ça se vit, avec ses phases, ses projets, ses trucs, ses machins, mais ça existe hors de la passion-fusion. J'en connais qui appellent ça complicité sur nos trois intelligences mentale, instinctive et émotionnelle, en même temps, tour à tour ..., d'autres appellent cela synchronisation ... Moi, j'appelle ça l'amour. Si cet amour véritable est basé sur la Vérité, sa quête et son aboutissement sont portés par le désir amoureux …
Le désir amoureux est magique et puissant. Le désir amoureux est la flamme qui chauffe et qui éclaire. Le désir amoureux est l'énergie nécessaire pour se voir et voir l'autre tel qu'il est. Le désir amoureux est un jardin secret qui préserve de l'étouffement du couple, qui avive l'attachement à son conjoint, oxygène le goût pour la vie. Le désir amoureux naît de se sentir vraiment regardé, "Un homme (une femme) m'a réveillée et il (elle) ne t'a rien pris, je suis là. Le secret est l'écrin du bonheur."
Dans la colonne à droite (sous l'intitulé "Albums Photos"), vous trouverez des informations pratiques sur ce livre, des morceaux choisis, ainsi que la biographie et la bibliographie de l' Auteur.
Oui je comprends, et je me souviens avoir approché "la conversation amoureuse" en plusieurs temps. Je n'ai réussi à rentrer dedans et à l'apprécier fortement qu'à un moment spécifique de ma vie, où j'étais toute ouïe à la relation à 2 qui se ressent mais ne se parle pas. Il y a en effet de la pesanteur, c'est une ambiguité face à la légèreté du désir amoureux. C'est une approche assez mentale du monde émotionnel. Et j'avoue qu'Alice Ferney me scotche assez de réussir cela. Et vous n'êtes pas la 1ère que j'entends dire que la partie pesante a pu voiler la partie légère.
Connaissez-vous "Les autres" d'Alice Ferney ? Un roman encore plus structuré que "La conversation amoureuse" ...
Merci de votre participation à diversifier les points de lecture C'est enrichissant ;-)
Rédigé par : Connivences | 24 novembre 2009 à 11h26
Puisque je viens de le terminer voici un petit commentaire.
Je suis assez dubitative en refermant ce livre, les sentiments, les émotions prennet du relief sous la plume d'Alice Ferney, les histoires qui croisent celle de Gilles et Pauline donnent du souffle à la narration simplement cette forme rapportée des dialogues m'a lassé ...dit-elle...dit-il... sans passage à la ligne, j'ai trouvé que cela rendait la lecture pesante.
Rédigé par : Mlle Swann | 24 novembre 2009 à 08h09
Je suis en pleine lecture de ce livre mais est-ce vraiment un roman? Oui mais pas seulement, il fait tellement écho à notre vie personnelle!
Rédigé par : Mlle Swann | 21 novembre 2009 à 11h25